Nekyomanteion, Salle des Augures
Le Grand Pontife se dirigeait vers son trône, attendant les Trois Oracles. L'Ascension des Enfers avait été surprenante. Le Spectre du Buffle était en effet un combattant plein de surprises.
Un mois. C'était le court laps de temps qu'il avait fallu à Gladius pour devenir Spectre. Un mois... c'était aussi la période durant laquelle la situation diplomatique avec les Chevaliers s'était fortement dégradée.
Ceux-ci n'avaient pas cru un mot du rapport de Nergal du Rat... Quant aux armures ramassées sur les cadavres des Ameshas et envoyées aux Athéniens, ceux-ci ont prétexté que c'était une raison supplémentaire de l'infamie des Spectres.
Les idiots ! Ne voyaient-ils donc pas la différence entre des Surplis et ces répliques de pacotille ? Qui plus est, un Spectre avait perdu la vie pour rapporter ces preuves !
Mais l'arrivée des Oracles mît fin aux pérégrinations du Grand Pontife. Ceux-ci se positionnèrent dans leurs trois chaises respectives, ornées d'ivoire et d'argent. Le Grand Pontife ne dît mot, attendant les paroles des Oracles, qui restèrent également cois.
L'un des Oracle se jeta sur le Grand Pontife et l'entoura à une vitesse prodigieuse, faisant s'élever dans les airs un arc électrique noir qui eût tôt fait d'emprisonner le Pontife dans une espèce de cage d'éclairs noirs.
Mais le Pontife dégaina son épée noire et, d'un coup sec, trancha la cage comme un vulgaire morceau de papier. L'Oracle fût projeté contre une colonne de marbre qu'il traversa de part en part avant de s'enfoncer dans le mur, laissant tomber sa robe d'Oracle.
Le Pontife regarda alors de plus près l'impudente. Elle avait des cheveux châtain clair qui s'accordaient bien avec sa peau matte. Ses yeux quant à eux étaient d'un noir absolu, sans pupille. Son armure était des plus étranges. L'Amesha était recouverte d'écailles métalliques qui ressemblaient à celles des lézards.
La tête de l'animal lui servait d'ailleurs de spalières, chaque côté de la mâchoire étant sur l'un ou l'autre de ses coudes, tandis que la queue de l'animal s'enroulait autour de son torse jusqu'au bas du dos.
Ses jambières, allant de mi-cuisse aux pieds, avaient la particularité de représenter aux genoux une moitié de visage féminin, qui, lorsque l'Amesha rejoignait ses genoux comme elle le faisait alors, se transformait en une créature humanoïde pleine de sadisme et de cruauté, accentué par les écailles et les crocs dont était pourvus chaque côté du visage.
Néanmoins quelque chose attira l'attention de Phélios. Il s'agissait d'une sorte de tatouage sur le cou de l'Amesha. Celui-ci brillait d'un bleu ténébreux et semblait être délié du cosmos de la guerrière...
La jeune femme allait répondre mais l'un de ces complices, sans doute son chef, l'intima de se taire d'un geste sec.
Une puissante aura enveloppa soudainement le corps du Grand Pontife, soulevant une incroyable bourrasque de vent dans la Salle des Augures. Le cosmos dégagé par le Pontife était d'une puissance telle que les Ameshas reculèrent contre leur gré, comme s'ils étaient poussés par des mains invisibles.
Seul le meneur du groupe semblait résister, sa capuche s'enlevant alors de sa tête et révélant un homme d'une vingtaine d'années, les cheveux blonds, le regard teinté de bleu, avec une cicatrice sur la bouche recouverte par une fine barbe dorée.
Celui-ci dévoila alors sa main avec, dessus, le même sceau que la femme Amesha. Le sceau brilla alors de plus en plus, créant soudain un vortex noir qui s'éleva dans les airs en aspirant l'énergie du Pontife.
Soudain, l'aura du Grand Pontife s'accentua, tandis que l'Épée du Sombre Monarque fendît l'air, créant des traînées cosmiques qui semblaient former un signe. L'Amesha se retrouva alors face à un sceau deux fois plus grand que le sien, constitué d'un cercle de lumière violette avec de multiples signes inscrits dans une langue inconnue. Le Grand Pontife apposa alors sa main dessus en y concentrant son cosmos.
Le sceau créé par le Grand Pontife explosa, libérant des vagues d'énergie blanche qui enveloppèrent les Ameshas impuissants, ainsi que toute la pièce. Les trois combattants se mirent soudain à briller sous l'enveloppe d'énergie qui les recouvrait désormais, drainant leurs corps sans qu'ils puissent réagir.
Les deux autres Ameshas touchèrent alors leurs sceaux qui s'activèrent, recouvrant leurs corps d'ombre en faisant écran contre les vagues d'énergies blanches du Pontife. Après quoi, les formes de leurs corps s'évaporèrent et les trois Ameshas se volatilisèrent.
Le Grand Pontife planta alors l'Épée d'Hadès sur le sol, libérant une énergie phénoménale qui se diffusa à travers tout le palais. Chaque pan de mur, chaque colonne, chaque escalier fût alors parcouru par une puissante impulsion magnétique qui se diffusa jusqu'en dehors du palais, devant la place centrale.
Le Nekyomanteion fût alors recouvert d'un immense dôme de lumière parcouru d'éclairs violets. Le Grand Pontife retira ses mains de l'Épée qui resta plantée dans le sol, libérant sans cesse une énergie continue qui devait servir à alimenter le dôme.
Les portes de la Salle des Augures s'ouvrirent alors avec fracas, tandis qu'une dizaine de Gardes avec, à leur tête, un homme en tunique de combat, se précipitèrent vers le Grand Pontife pour lui porter secours, visiblement trop tard...
Le meneur avait les cheveux très courts et un regard de loup. Ses yeux étaient marron clair voire même transparent. Il portait sur l'oreille droite une boucle de fer où était accrochée une dent de canidé.
D'ailleurs, le regard et le comportement de l'homme faisaient penser à ces créatures féroces qui chassent en meutes et qui, parfois, attaquent les troupeaux de brebis dans les montagnes de la Grèce septentrionale.
Puis Lobo s'inclina une dernière fois avant de sortir de la salle en courant.
Gladius s'éveilla lentement, le corps tendu en émettant un long râle de satisfaction. Il lui semblait avoir passé la meilleure nuit de sa vie. En effet, peu après l'obtention de son Surplis, il avait eu droit à une fête digne de ce nom qui l'avait emporté toute une partie de la nuit.
Son maître lui avait offert un verre d'une étrange mixture servie dans une corne de bœuf. Le breuvage, que Nergal appelait "cervoise", était soi-disant la boisson par excellence de son pays d'origine et était de couleur rouge quasi-noir.
Mais sa principale caractéristique se résumait en un goût particulièrement fort et aigre qui avait assommé le jeune homme en seulement deux verres. Après quoi, il s'était rendu tant bien que mal dans ses appartements avec sa nouvelle armure.
C'est pourquoi ce matin-là, Gladius se réveilla avec un mal de tête carabiné, comme si on enfonçait des clous de part et d'autre de son crâne.
Le jeune Spectre bondît alors du lit et attrapa son vieux pantalon en cuir de bœuf ainsi que sa tunique de combat. Il eût à peine le temps de l'enfiler que la porte de sa chambre fût propulsée contre le mur.
Gladius eût alors en face de lui le Spectre le plus terrifiant qu'il ait jamais vu. Équipé de griffes longues et tranchantes aux mains, le Spectre était vêtu d'une armure bleu-ciel qui recouvrait intégralement son corps. Ses jambières ressemblaient à des pattes de loup, tandis que son casque recouvrait tout le tour de la tête, excepté le sommet du crâne qui laissait dépasser ses cheveux rebelles.
Ses yeux et son nez étaient recouverts par le casque qui n'étaient autre qu'une espèce de créature hybride, mi-homme, mi-loup, avec une mâchoire qui enfermait le visage du Spectre. Ses épaulières, quant à elle, étaient larges et discontinues, avec de larges pics assez longs constitués de diverses teintes de bleus, ce qui n'était pas sans rappeler les rayons de la lune.
Au premier abord, le Spectre semblait très agressif et Gladius crût pendant un instant qu'il allait se jeter sur lui mais celui-ci se contenta de rugir avec une voix rauque et autoritaire.
Au mot "Ahriman" Gladius n'eût qu'à regarder son urne pour que celle-ci s'ouvre en émettant un flash de lumière rouge. Le Buffle sortît alors de son enclos séculaire et se sépara en morceaux distincts.
Gladius s'équipa alors de son casque, ses épaulières, son plastron et ses jambières qui s'accrochèrent à lui sans qu'il n'eût besoin de les prendre. Le Spectre du Buffle sortit alors de son logement et courût jusqu'à la cour du Palais du Nekyomanteion.
Le jeune homme ressentit alors pour la première fois la puissance de son Surplis. En effet, malgré la lourdeur apparente de celui-ci, Gladius se sentait extrêmement léger et n'avait aucun mal à courir. Qui plus est, il lui semblait qu'il courait plus vite qu'avant et qu'il parcourait de plus grandes distances à chacun de ses pas. Il arriva en effet devant la cour du Palais en seulement deux minutes contre une dizaine avant qu'il n'eût les honneurs du Buffle.
Néanmoins, Gladius n'eût guère le temps de s'attarder sur les capacités que lui prodiguait son armure. En effet, celui-ci se rendît compte que le Palais était recouvert d'un dôme violet qui l'englobait totalement, tandis que les Soldats à l'intérieur de celui-ci ne cessaient de courir à droite et à gauche, visiblement à la recherche des suppôts d'Ahriman.
Lobo était toutefois arrivé avant lui, ainsi que Nergal et Lokus qui parlaient déjà avec le Lycanthrope.
Le Spectre du Rat rejoignit alors son disciple et Lokus qui se dirigeaient déjà vers l'Aile Ouest du Palais, tandis que Lobo emprunta la Porte Principale, les yeux et le sourire fourbes. Pour lui, cette mission n'était qu'un simple jeu auquel il était très fort : la chasse à l'homme...
Dans l'un des coins sombres du Palais, deux Spectres avançaient à pas de loup. Les guerriers du Sombre Monarque sentaient la présence d'un cosmos particulièrement mauvais qui traînait dans les parages et dont la source se trouvait dans une pièce sombre sans issue.
L'un des Spectres prît une torche et alluma celles accrochées aux murs. Les deux Spectres virent alors avec stupéfaction que la pièce, désormais éclairée, était habitée par l'un des Oracles.
Le deuxième resta en retrait, visiblement soucieux et méfiant. Quelque chose n'allait pas chez l'Oracle. Que faisait-il ici alors qu'il devait être consigné dans ses appartements ? Et ce cosmos... Non, ce n'était pas l'Oracle !
Le Spectre du Termite n'eût pas le temps de réagir. Un fouet de fer noir muni d'espèces de clous tranchants s'enroula sur le Termite, se plantant dans sa chair et dans son armure. L'Amesha se retourna alors face à la torche, laissant voir un visage mutilé. L'homme dégageait une aura bleu-noir qui saisit d'effroi le camarade du Termite, qui se tordait de douleur.
Le Perce-oreille fonça sur son adversaire avec rage et puissance, suivi par une traînée de lumière verte, mais son adversaire fût plus rapide.
Il tira d'un coup sec son gigantesque fouet qui s'éleva dans les airs avec le Termite hurlant de douleur. Après quoi, il tourna sur lui-même en libérant une puissante énergie bleutée qui s'achemina jusqu'au fouet. Le Termite fût alors expulsé à une vitesse prodigieuse, tandis que le fouet clouté le saigna de part en part tout en frappant le Perce-oreille à la nuque.
L'homme se retrouva alors seul debout, tandis que le Termite gisait sur le sol, au milieu d'un cratère, agonisant. Le Perce-oreille s'écroula sur le sol, la tête tranchée.
L'homme enleva alors sa cape, laissant voir au Termite la véritable nature de son ennemi. Le Termite vît alors un homme d'une trentaine d'années, le visage couvert de balafres, comme s'il avait combattu un fauve. Son visage était en effet couvert de coups de griffes, avec des cicatrices qui se croisaient de part et d'autre de sa tête. D'ailleurs, une partie de ses cheveux était également recouverte de ces fameuses plaies, puisque une trace de griffes empêchait ses cheveux bruns de repousser. Ses yeux étaient d'un vert très foncé et ne dégageaient que mépris et férocité.
Mais le plus féroce des aspects de l'homme était sans doute l'armure qui recouvrait son large corps de brute. Il portait dans sa main droite un énorme casque de loup dont la mâchoire grande ouverte contenait largement la tête d'un homme. Qui plus est, ses épaulières n'étaient autres que des espèces de pattes recouvertes de pics métalliques, qui se terminaient par de larges crocs recourbés.
Les gantelets de l'homme étaient construits sur le même principe, à la différence que ses poings se terminaient par une série de petits pics au niveau des phalanges, sans doute pour mieux blesser son adversaire en le frappant. Enfin, les jambières de l'homme était constituées de plaques de métal reliées les unes aux autres par des sortes de gravure où étaient inscrits des signes persans.
L'Amesha se rapprocha du Termite qui gisait à terre et l'attrapa par le cou, le levant de terre d'une seule main.
Puis le Djinn brisa la nuque du Termite d'une simple pression du pouce. Après quoi, il jeta son cadavre sur le sol, auprès de son compagnon sans tête et remit son casque.
Aussitôt, la femme lézard et son supérieur sortirent des deux colonnes où ils s'étaient cachés. Le chef s'avança auprès de son disciple tandis que sa subalterne laissa sa main plonger dans la mare de sang qui s'étendait depuis la nuque ouverte du Perce-oreille. Puis, elle mît un doigt dans sa bouche afin de goûter le sang des guerriers d'Hadès.
Les trois Ameshas éclatèrent alors de rire, un rire maléfique qui se répandit dans les murs du palais. Après quoi, les ténébreux Orientaux se réunirent autour de leur chef, tendant l'oreille au sinistre complot que celui-ci avait préparé...
Gladius, Lokus et Nergal arpentaient les couloirs du Palais depuis plus de deux heures déjà. Ils n'y avaient trouvé aucune trace de vie ou de cosmos maléfique, mais le Spectre du Buffle s'étonnait de la facilité dont faisait preuve ses aînés pour s'orienter dans les méandres du Palais, alors que lui-même le jour d'avant n'avait pas su mettre un pied devant l'autre en sachant où il allait.
Le jeune homme réalisa alors que peu de temps s'était écoulé entre l'élimination d'Arsalàn à Oneiros et une nouvelle attaque des Ameshas au Nekyomanteion.
Certes, entre temps, Gladius avait eu le temps de devenir un Spectre mais il n'y avait qu'un mois d'intervalle entre les deux assauts. Et si les Ameshas venaient de Perse comme ils le prétendaient, autrement dit par delà la Mer Méditerranée, un problème se posait : comment avaient-ils franchi une aussi grande distance en si peu de temps ?
Toutes ces questions occupaient l'esprit du jeune homme pendant son trajet dans les dédales du Palais mais la curiosité vint ranimer sa langue.
Le Spectre du Rat regarda alors son apprenti avec hésitation mais cela n'étonnait plus Gladius. Il savait en effet que son maître n'hésitait que dans des situations cruciales voire critiques et que ses prochains mots seraient sans aucun doute le fruit d'une intense réflexion.
Néanmoins, des bruits de pas derrière les Spectres stoppèrent leurs débats. Le Rat, la Panthère et le Buffle se mirent tous trois en garde, prêt à se défendre si jamais ces pas venaient d'un adversaire... Mais au lieu de cela, les trois hommes virent arriver vers eux un Soldat de la Garde Spectrale du Palais, qui se précipita vers eux à toute allure aussi vite qu'il pût.
Nergal ne répondit pas sur le champ, se contentant de sourire également, tout comme Lokus.
Les deux Spectres disparurent rapidement du couloir et leurs bruits de pas se firent de plus en plus sourds. Le silence s'installa. Désormais, Gladius était seul.
Lobo était sur la piste des Ameshas depuis de longues heures mais il n'avait jamais eu la sensation d'être aussi près du but que maintenant.
Il n'avait même pas eu besoin de regarder où aller car son odorat était le meilleur guide qu'il pouvait avoir. Le Lycanthrope courait ainsi à toute allure dans les couloirs et dédales du Palais, reniflant chaque pan de mur, de tapisserie ou de meuble qui passait à sa portée.
Les odeurs défilaient dans sa tête en de vagues sensations brumeuses, qui pourtant avait toutes une identité précise, de la pierre calcaire aux fraîcheurs poussiéreuses aux moisissures d'arômes plus ou moins forts et plus ou moins humides.
Néanmoins, Lobo avait découvert une nouvelle odeur, plus voluptée et douce que les autres, une odeur qu'il avait déjà reniflé de très nombreuses de fois par le passé : du sang humain.
L'Étoile Céleste de la Transformation accéléra son allure, parcourant des dizaines et des dizaines de couloirs plus ou moins sombres en à peine quelques secondes, se laissant guider par son fin odorat en fermant les yeux, reniflant cette odeur de plus en plus forte et de plus en plus nette.
Lobo arriva alors à sentir le sang humain avec une telle netteté qu'il pouvait presque le toucher mais il se contenta d'ouvrir les yeux. Il se trouva alors face aux cadavres de deux des trois Spectres envoyés pour inspecter l'Aile Est, où il se trouvait actuellement.
Il se pencha alors pour inspecter les corps. L'un d'eux gisait au sol, exsangue, avec une nuque qui ne débouchait sur rien. La tête, censée combler cette ouverture, gisait non loin de là.
L'autre Spectre, quant à lui, avait encore son casque de Spectre qui lui recouvrait intégralement la tête. Lobo retira alors ce masque de fer, dévoilant un jeune homme de moins de vingt hivers, les cheveux noirs bouclés, l'œil pétillant, et, même dans la mort, le sourire aux lèvres. Lobo sentît alors une autre odeur de chair, celle d'un être bien vivant cette fois-ci.
Le Spectre du Lycanthrope se retourna alors, faisant face à son collègue.
L'homme, ou plutôt le jeune homme, était assez mince, svelte, et plus petit que Lobo. Il ressemblait à un enfant, tant ses traits étaient fins, sa peau nette et ses yeux bruns emplis d'innocence. Ses cheveux, de la même teinte que ses yeux, étaient coupés en brosse.
Néanmoins, lorsque l'on regardait son armure, on comprenait qu'il n'avait rien à voir avec un enfant mais qu'il était bel et bien l'un des Spectres d'élite du Sombre Monarque.
Son surplis était constitué d'une paire d'ailes recourbées vers le haut, semblable à des ailes d'oiseau d'un bleu très foncé. Il avait également sur la tête un casque représentant une étrange créature (peut-être un cheval ?) avec des yeux clairs surmontés d'une paire de petites cornes de cerf.
Le reste de son armure était constitué d'un plastron qui lui recouvrait tout le corps, avec des épaulières assez large mais simples, bardées de deux petites ailes sur les côtés.
Çà et là, des gravures en forme de croissant de lune ou de demi-lune luisaient ardemment, tandis que les jambières et gantelets du Spectre reproduisaient à peu près le même schéma avec, cependant, des petites ailettes sur le côté, particulièrement tranchantes.
Nexos se retourna et regarda la surface de pierre qui lui faisait face. Il s'aperçut alors que, contrairement aux autres murs de la pièce, celui-ci était bardé de fissures de tout côté.
Il toucha alors la surface du mur et sentit un courant d'air. Nexos se contenta alors de presser légèrement le mur pour que celui-ci s'effondre, dévoilant un passage fraîchement créé qui menait dans une autre salle.
Nexos souri légèrement avant de s'engager dans le tunnel, secondé par Lobo. Les deux étoiles célestes débouchèrent alors sur une vaste salle semblable à la précédente, à la différence près que celle-ci était habitée.
En effet, un homme au visage balafré et recouvert d'une armure d'ébène attendait les Spectres. Une puissante aura se dégageait de celui-ci, tandis que le fouet de métal qu'il tenait dans ses mains frétillait dans les airs, visiblement prêt à frapper les Spectres.
Le Lycanthrope se propulsa soudain sur l'Amesha qui, s'attendant à une telle tactique, lança son fouet qui balaya les airs avant de s'abattre sur le Spectre.
Mais c'était sans compter sur Nexos qui bloqua le fouet de sa main nue, ce qui lui laissa échapper un grincement de douleur lorsque les pics du fouet se plantèrent dans sa chair.
Néanmoins, l'Amesha avait compris le stratagème des Spectres, et sitôt que Nexos retint le fouet du Djinn, celui s'empressa de le jeter sur une colonne de marbre avant de lancer une fois de plus son fouet sur le Lycanthrope.
Le fouet fendît l'air et frappa de plein fouet le Lycanthrope, qui eût néanmoins le réflexe de se baisser en courant, avant de prendre appui sur ses mains et ses pieds en se propulsant en avant.
Lobo parvint ainsi à éviter juste à temps un troisième coup de fouet qui traversa le mur non loin de la porte. Le Djinn laissa alors échapper un grognement de mécontentement avant de se retourner vers la seule proie qui lui restait.
Nexos se releva en regardant l'état de sa main droite : celle-ci était largement ouverte au-niveau de la paume avec de larges plaies créés par les pics du fouet de l'Amesha. Nexos regarda alors celui-ci d'un regard haineux, son corps libérant soudain une aura couleur turquoise.
Namäan du Djinn libéra alors son cosmos, se voilant d'un rideau d'énergie d'un bleu ténébreux. Son fouet voltigea dans les airs comme s'il était doué de conscience, parcouru par le cosmos de son maître et pointant soudainement vers Nexos qui se mît en garde, prêt à esquiver la terrible arme du Djinn.
Aussitôt, l'épais fouet du Djinn s'élança sur Nexos, qui eût néanmoins le temps d'esquiver la pointe du fouet avant de foncer sur Namäan, vif comme l'éclair. Son poing fendît l'air si vite que l'Amesha n'eût même pas le temps de voir venir le coup.
Seul un large sourire s'affichait sur l'Amesha qui n'avait sans doute pas encore vu Nexos esquiver le coup. Pourtant, alors que le poing du Kirin se trouvait à quelques millimètres du visage de l'Amesha, son bras se bloqua, et un éclair de douleur parcourût Nexos.
Il s'aperçût alors, avec surprise, que le fouet s'était rabattu au dernier moment et avait bifurqué sur son bras, le coinçant à travers les griffes d'acier dont l'arme était pourvue.
Nexos laissa échapper cette fois-ci un faible cri de douleur tandis que le fouet, visiblement guidé par le Djinn, s'abattît une nouvelle fois sur Nexos en s'enroulant autour de lui tel un serpent, se plantant dans les zones dépourvues de protections du Kirin mais aussi sur les pans de son armure, sans pouvoir néanmoins s'y planter.
L'Étoile de la Perfection était désormais complètement immobilisée mais aussi entièrement écorchée, son sang se répandant sur le fouet du Djinn qui, de ses lèvres balafrées, laissait échapper un sourire de satisfaction.
Le fouet fût alors parcouru d'une onde de cosmos qui balaya le corps du Spectre. Nexos sentît son corps tourner sur lui-même, au fur et à mesure que les pics du fouet se plantaient de plus belle sur sa chair.
Namäan déroulait le Spectre à une vitesse qui devait être équivalente voir supérieur à celle du son, écorchant de plus belle son adversaire. Son fouet, d'une longueur inimaginable, se courba soudain, tandis que Namäan projeta son adversaire sur le mur. Nexos, qui tournait sur lui-même si vite qu'on ne distinguait plus ses membres et sa tête, heurta le mur qui s'effondra sous le choc.
Une explosion retentît soudain, laissant échapper un flash de lumière bleu qui détruisît le reste du mur. Nexos était debout, couvert de sang, mais le cosmos qui l'entourait était d'une puissance telle que Namäan fût projeté face contre terre.
Nexos ne répondit pas, mais ses yeux étaient désormais remplis d'une lueur guerrière qui faisait froid dans le dos. Sa stature, son pouvoir et la soudaine force que dégageait le Kirin avait calmé l'Amesha de la Douleur qui regardait maintenant le Kirin avec un regard presque admiratif.
Nexos avança vers l'Amesha sans même laisser paraître la moindre souffrance alors que son sang se répandait sur le sol de marbre. L'Amesha, se relevant, sentît alors un courant d'air remplir la pièce, traversant les couloirs tout en convergeant vers Nexos, qui regardait l'Amesha sans aucune expression, ni de haine, ni de pitié, ni de souffrance.
Le Spectre du Kirin était désormais entouré par un puissant vent bleuté. Son cosmos était marqué par une intense lumière qui illuminait la pièce. Qui plus est, l'aura bleutée qui entourait l'Étoile Céleste de la Perfection semblait gagner en puissance, parcourue par des espèces d'ondes énergétiques qui faisaient trembler le sol.
C'était comme si le cosmos de Kirin avait atteint une pureté et une fluidité maximale. Nexos ne faisait pas qu'utiliser son cosmos, il faisait corps avec lui, comme s'il était transcendé par une force extrêmement puissante.
Une forme se dessinait presque dans l'ombre du Spectre, une ombre qui ressemblait presque à un animal, une sorte de cheval noir majestueux, affublé d'une paire d'ailes et de cornes d'ivoire.
L'Amesha libéra alors son aura bleu-noir qui parcourût son corps, s'envolant dans les airs et ébréchant le sol par la puissance délivrée. Pas de doute : le Kirin avait dépassé le stade du sixième sens.
Les deux cosmos se touchaient presque, les deux adversaires ayant atteint un niveau de concentration exceptionnelle. Le vent devenait de plus en plus violent et une véritable tempête se leva dans la salle souterraine du Nekyomanteion.
Le fouet du Djinn s'éleva lui aussi dans les airs, tourbillonnant autour du Djinn à une allure incroyable. Les yeux du Djinn changèrent soudain d'expression et de teinte.
Un voile noir couvrît ses pupilles, tandis que l'ombre de Namäan se transforma, devenant peu à peu un être sanguinaire et démoniaque, un être à tête de loup avec des griffes tranchantes, terminées par une sorte de vapeur d'ombre. Le visage de l'Amesha avait prit une expression encore plus diabolique et Namäan regardait le Kirin avec un rictus de psychopathe.
Le Spectre était blessé mais le Kirin qui le symbolisait venait d'être libéré. De même, l'Amesha avait libéré l'être démoniaque qui habitait son armure, le laissant prendre possession de son corps.
La tension avait atteint son comble entre les deux adversaires. Le vent s'engouffrait dans la salle, balayant la poussière sur le sol et répandant le sang du Spectre.
Le combat allait de nouveau reprendre entre le Kirin et le Djinn alors que le Lycanthrope s'engouffrait dans les ténèbres du Palais d'Hadès, sans se douter du malheur qui allait s'abattre sur lui...